Port-au-Prince, 19 mai 2025 – Le Bureau des droits de l’homme des Nations Unies (BINUH), en collaboration avec le gouvernement canadien, multiplie les formations à l’intention des agents de la Police nationale d’Haïti (PNH) sur les droits humains et la prévention des violences sexuelles.
Ce lundi, plus d’une vingtaine de policiers et policières ont reçu leur certificat d’apprentissage. Plusieurs voix dénoncent le décalage flagrant entre ces initiatives diplomatiques et la réalité brutale vécue par la population.
Le mardi 15 avril dernier, à l’occasion de la Journée nationale des femmes, la Coordination Nationale des Affaires Féminines et aux Questions de Genre (CNAFQG) a organisé une journée de sensibilisation à l’hôtel Kinanm 2, à Pétion-Ville. Le thème : « La Masculinité positive : une nécessité pour un corps de police équilibré en Haïti. » Des personnalités de haut rang étaient présentes : l’ambassadeur du Canada André François Giroux, la ministre à la Condition féminine Pedrica Saint-Jean, des juges de haut niveau et des représentants de la PNH. Plusieurs policiers et policières ont été décorés pour leur engagement envers les valeurs de la CNAFQG. Le Canada et la France sont des pays très actifs au sein de la PNH pour les formations, notamment en ce qui concerne les droits humains et la violence basée sur le genre.
Mais alors que les certificats s’accumulent, la réalité sur le terrain semble es autre. Une vidéo devenue virale montre un policier giflant violemment un présumé enseignant dans la foule lors des cérémonies officielles de la Fête du Drapeau au Cap-Haïtien. L’homme revendiquait pacifiquement ses droits.
De nombreux témoignages recueillis par Le Quotidien 509 confirment également la banalisation des violences sexuelles dans les commissariats. Des femmes victimes de viols affirment que des agents de police, censés recueillir leur plainte, les tournent en dérision, les accusent d’avoir « provoqué » leurs agresseurs, ou tout simplement les ignorent. Une situation insoutenable dans un pays qui prétend renforcer l’égalité de genre et la protection des droits fondamentaux.
« Former sans sanctionner, c’est cautionner les dérives », confie une militante des droits humains.
« Sensibiliser sans supervision, c’est entretenir l’impunité. »
Sur le papier, les programmes du BINUH se veulent ambitieux. Mais sans mécanismes de suivi, structures disciplinaires effectives et volonté politique de nettoyer les rangs, les formations deviennent de simples exercices de communication, et les certificats des décorations vides de sens.
Entre les beaux discours diplomatiques et les gifles en uniforme, c’est tout un système de façade qu’il faudra un jour déconstruire.
La rédaction