Selon le dernier rapport trimestriel du Bureau intégré des Nations unies en Haïti (BINUH), au moins 1 520 personnes ont été tuées et 609 autres blessées entre le 1er avril et le 30 juin 2025, dans un contexte de violence généralisée alimentée à la fois par les gangs armés, les groupes d’autodéfense et les forces de sécurité de l’État.
Les opérations policières et militaires ont causé 64 % des morts recensés, soit la part la plus élevée depuis 2022.
D’après les Nations unies, 814 personnes ont été tuées et 449 blessées lors d’opérations des forces de sécurité haïtiennes. Fait alarmant, 36 % de ces décès ont été provoqués par l’utilisation de drones explosifs, tandis que 15 % des victimes n’avaient aucun lien connu avec les gangs.
Les gangs armés, de leur côté, restent responsables de 24 % des homicides, notamment dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince (77 %), mais aussi dans le Bas-Artibonite (16 %) et le département du Centre (4 %).
La commune de Kenscoff demeure, selon le rapport, “extrêmement volatile”, marquée par des affrontements sporadiques et des déplacements massifs de population.
Le BINUH rapporte la commission de 73 exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires entre avril et juin 2025.
Parmi elles, 46 sont attribuées à des agents de la Police nationale d’Haïti (PNH), et 27 directement au commissaire du gouvernement de Miragoâne, Jean Ernest Muscadin.
Le rapport souligne que ces exécutions ont souvent été revendiquées publiquement par le commissaire, présentées comme des “opérations de justice populaire” contre des individus soupçonnés d’appartenir à des gangs.
L’ONU rappelle que ces pratiques violent gravement les principes de l’État de droit et les engagements internationaux d’Haïti en matière de droits humains.
« Le recours à la force doit être strictement proportionné et encadré. Les exécutions sommaires ne peuvent en aucun cas être justifiées par la lutte contre les gangs », a souligné le BINUH dans ses observations.
Au cours du trimestre, 628 victimes de violences sexuelles ont été recensées, dont la majorité dans les quartiers sous contrôle de gangs poursuit le rapport.
Les enlèvements demeurent un instrument de terreur : 185 cas documentés par le BINUH, principalement à Port-au-Prince.
Parallèlement, 1,3 million de personnes étaient déplacées internes en Haïti au 30 juin 2025, conséquence directe de l’insécurité et des affrontements armés.
Malgré ce contexte dramatique, les Nations unies notent la création de pôles judiciaires spécialisés contre les crimes de masse, les violences sexuelles et les crimes financiers.
Cependant, le BINUH exhorte les autorités haïtiennes à aller plus loin :
- Accélérer la mise en œuvre effective des pôles judiciaires spécialisés.
- Engager un processus de vetting pour écarter de la police les agents impliqués dans des violations graves.
- Renforcer la cohérence et la discipline des forces de sécurité nationales.
- Créer un programme de prévention et de réhabilitation pour les mineurs enrôlés par les gangs.
- Renforcer la protection des populations vulnérables avec le soutien humanitaire international.
Le rapport du BINUH dénonce une réalité complexe : la militarisation progressive de la réponse sécuritaire face aux gangs s’accompagne de graves violations des droits humains, parfois cautionnées par des représentants de l’État.
L’implication du commissaire Muscadin, déjà controversé pour ses prises de position radicales, illustre la dérive d’une justice en crise, oscillant entre impunité et violence d’État.
Sans une réforme rapide des institutions judiciaires et policières, Haïti risque de consolider un cycle de répression et de vengeance dont les civils demeurent les premières victimes.
La rédaction
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