L’Office de la Protection du Citoyen (OPC) dit prendre acte de la nomination, suivie de l’installation des membres du Conseil présidentiel de Transition (CPT), qui se voit confier désormais les rênes du pays. Il dit souhaiter que les actions des nouveaux dirigeants s’articulent autour des mesures urgentes et efficaces pour le rétablissement de la sécurité et des règles de droit.
La crise sociopolitique qui sévit en Haïti depuis l’assassinat, le 7 juillet 2021, du président Jovenel Moïse, s’est empirée notamment depuis les manifestations anti-gouvernementales de février dernier, reconnait l’OPC.
L’institution dirigée par Renan Hédouville, dit noter avec intérêt que dans le cadre de l’accord du 3 avril, les parties prenantes se sont engagées à créer les conditions nécessaires en vue de conduire le pays vers le rétablissement de l’ordre démocratique et la reconstitution des institutions républicaines en ciblant notamment la sécurité publique, le redressement économique, la sécurité alimentaire, la justice, les élections pour le renouvellement du personnel politique et la construction d’un État de droit.
En effet, Haïti vit une situation chaotique à plusieurs niveaux avec notamment une augmentation de la violence liée aux activités criminelles, aux violations graves de droits humains y compris les violences sexuelles. Mettant en péril la paix, la stabilité et la sécurité de la région.
Les activités des gangs ont aussi provoqué l’arrêt des activités à l’Aéroport international Toussaint Louverture, alors que des centres hospitaliers, des commissariats de police, des pharmacies, des établissements universitaires, scolaires, publics et privés, des cabinets d’avocats ont été la cible des individus armés.
Les membres du gouvernement sortant d’Ariel Henry en poste depuis l’assassinat de Jovenel Moïse, ont leur part de responsabilité dans cette crise pour s’être faits complices des groupes armés, soutient l’OPC.
« Dans l’ensemble, la situation globale d’Haïti (loin d’être une fatalité, mais plutôt la résultante de l’irresponsabilité ou de l’insouciance des uns et l’hypocrisie des autres) est, on ne peut plus, inquiétante et tous les indicateurs sont au rouge avec une régression constante enregistrée dans le domaine du respect, de la protection et de la mise en œuvre des droits humains », souligne l’OPC.
Aussi, il demande aux nouvelles autorités de faciliter la reprise des activités au niveau de l’aéroport international de Port-au-Prince, de mettre en place une commission de vérité et de justice conformément au contenu du document de base du Conseil présidentiel de Transition.
Cette commission aura pour mission, demande le protecteur du citoyen, d’enquêter sur les violations des droits humains et des crimes spectaculaires dont l’assassinat du président Moïse et du bâtonnier Monferrier Dorval.
Elle aura à identifier les auteurs matériels, commanditaires, complices et instigateurs, établir la véracité des faits, rendre justice et accorder réparation aux victimes ou à leur famille.
L’OPC demande également au CPT d’exiger du Haut-Commandement de la Police Nationale à travers le ministère de la justice, de créer une commission d’enquête crédible sur les évasions au pénitencier national et à la prison civile de Croix-des-Bouquets.
Il faut aussi que des mesures spéciales soient adoptées pour atténuer les souffrances de la population haïtienne (particulièrement les dizaines de milliers de déplacés internes) vivant dans des conditions de précarité et exposée à une crise humanitaire sans précédent.
La question des droits humains doit être au centre de la période de transition, devant aboutir à l’installation des dirigeants choisis par le peuple.
L’OPC demande aux partis et regroupements politiques de prioriser les intérêts supérieurs de la nation dans la perspective de la construction d’un État de droit en Haïti, de rejeter la violence politique en prélude aux élections générales.
Pour ce qui est des autorités judiciaires, l’OPC leur demande de créer des pôles judiciaires spécialisés compétents afin que les dossiers des crimes financiers, de violences sexuelles, et de bien d’autres affaires impliquant de graves violations de droits humains et crimes spectaculaires soient traités en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.
Il faut que la lumière soit faite sur le dossier de l’assassinat de cinq (5) membres de la Brigade de Sécurité des Aires Protégées (BSAP) lâchement exécutés le 7 février 2024 et enterrés dans une fosse commune sans procès-verbal de constat d’un juge de paix, recommande l’OPC.
Il y a aussi le dossier de nombreux journalistes tués ou agressés brutalement dans l’exercice de leur profession, particulièrement les cas de Garry Tesse, Romelson Vilcin, Jean Marc Jean, Lemy Brutus, Stenley Belford et Imozan Wilbord.
Les agressions cruelles et criminelles exercées sur des femmes et des filles notamment le cas de Micheline DORT, enlevée le 30 novembre 2023 et tuée de deux balles dans son vagin par le chef de gang de Savien (département de l’Artibonite), Luckson Elan, face à son refus de se faire violer, doivent être également prises en compte.
L’OPC plaide pour le recadrage du processus de certification des Magistrats tout en garantissant les voies de recours conformément aux principes universels en matière des droits de l’homme. Il faut aussi établir un protocole de traitement et de prise en charge spéciale des dossiers des enfants arrêtés pour leur implication éventuelle dans les violences armées.
L’institution dirigée par Renan Hédouville demande aux organisations de la société civile de renforcer la cohésion au niveau des OSC évoluant dans les différents départements géographiques du pays dans une perspective de mieux présenter aux instances concernées les cahiers de doléances.
Aux étudiants et écoliers, l’OPC demande de s’accrocher à l’éducation comme la vraie alternative en matière de progrès et de développement économique, en dépit du désespoir instauré par les forces obscures au niveau de la société, particulièrement chez les jeunes et les enfants.
Il leur demande de rester pleinement engagés dans la lutte pour le changement et le progrès en Haïti à travers l’implication dans une campagne pour une culture de la paix, de la tolérance, la bonne gouvernance, le respect des droits humains, avec l’idée que seuls les jeunes, assistés des ainés sérieux et compétents peuvent changer l’ordre des choses pour permettre à notre pays de connaître un développement endogène où la démocratie, le respect de la souveraineté, la lutte contre la corruption, la primauté du droit, deviendront les règles du jeu à l’instar des pays de plusieurs régions de la planète, dirigés par des jeunes qui ont combattu courageusement la gérontocratie, la marginalisation des jeunes et la gabegie administrative.
Enfin, l’OPC réaffirme sa volonté de s’impliquer davantage dans la lutte pour le respect de la dignité humaine et du droit à la vie. Il demande à la communauté internationale impliquée dans la crise en Haïti d’appuyer, de manière concrète, les nouvelles autorités politiques dans la lutte pour la restauration de la sécurité face aux exactions des bandes criminelles dans le pays.
Il faut aussi qu’elle renforce l’appui technique et financier accordé aux institutions et organisations évoluant dans le domaine du monitoring des cas de violations des droits humains, de soutenir la mise en place d’une Commission Nationale de Vérité et de Justice avec pour mandat d’enquêter sur les crimes commis et les violations de droits humains.
La Rédaction