Lors de la 48e Réunion Ordinaire des Chefs d’État et de Gouvernement de la CARICOM, tenue à la Barbade du 19 au 21 février 2025, plusieurs promesses ont été faites à Haïti. Le Conseiller-Président, Laurent Saint-Cyr, a plaidé pour un soutien renforcé à la Mission Multinationale de Soutien à la Sécurité (MMSS), une demande appuyée par le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres. Toutefois, au-delà des annonces officielles, ces engagements posent plusieurs questions quant à leur faisabilité et leur réelle portée.
Des engagements militaires symboliques ?
Parmi les annonces les plus marquantes, la Jamaïque a promis d’augmenter son contingent au sein de la MMSS, tandis que les Bahamas se sont engagés à accueillir une délégation haïtienne pour évaluer les défis liés à leur mission. Ces décisions, bien que symboliques, soulèvent plusieurs doutes :
1. Les contingents déjà en place sont-ils réellement efficaces ? L’envoi de nouvelles troupes peut sembler un geste fort, mais si les moyens logistiques et les stratégies d’intervention ne sont pas améliorés, cet apport risque de ne pas avoir d’impact significatif.
2. Les Bahamas vont-ils réellement aller au-delà d’un simple diagnostic ? Accueillir une délégation haïtienne pour “évaluer les obstacles” est une démarche vague. Concrètement, cela ne garantit ni un soutien financier ni un engagement à long terme.
Une coopération internationale incertaine
D’autres pays comme les Émirats Arabes Unis, la France et le Mexique ont exprimé leur volonté d’aider Haïti, mais ces annonces restent floues :
• Les Émirats Arabes Unis veulent “explorer un appui à la sécurité”. Qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Une aide financière ? Une assistance en armement ? Des formations pour les forces haïtiennes ? Rien n’est précisé.
• Le Sénat français, via le Groupe d’Amitié France-Caraïbe, veut proposer une résolution pour renforcer l’implication de la France. Or, une résolution parlementaire n’a pas de force contraignante. Cette promesse ressemble davantage à un geste diplomatique qu’à un véritable engagement.
• Le Mexique et Haïti ont discuté d’une coopération militaire, mais là encore, aucun détail n’a été fourni sur la nature de cette collaboration.
La libre circulation des Haïtiens dans la CARICOM : Une illusion ?
Un des sujets les plus attendus était la question de la libre circulation des Haïtiens dans l’espace CARICOM. Une décision est annoncée pour juin 2025, mais cette échéance semble déjà lointaine pour un dossier qui traîne depuis plusieurs années. Certains pays membres de la CARICOM, comme la République dominicaine ou les Bahamas, ont déjà montré une réticence à ouvrir leurs frontières aux migrants haïtiens.
Des élections en 2025 : Un vœu pieux ?
Enfin, M. Laurent Saint-Cyr a réaffirmé l’engagement d’Haïti à organiser des élections en 2025. Pourtant, la situation sécuritaire actuelle et l’absence de consensus politique rendent cet objectif extrêmement difficile à atteindre. Organiser des élections nécessite une administration fonctionnelle, des forces de l’ordre capables d’assurer la sécurité des bureaux de vote et un minimum de stabilité sociale, autant de conditions qui sont loin d’être réunies.
Conclusion : Des annonces qui demandent des preuves
Si les déclarations de la CARICOM témoignent d’une certaine volonté régionale de soutenir Haïti, elles manquent cruellement de détails concrets et de garanties quant à leur application. Les promesses diplomatiques sont une chose, leur mise en œuvre en est une autre. Haïti a besoin d’actions immédiates et durables, et non de simples engagements de façade destinés à entretenir l’illusion d’une solidarité régionale.
Seuls les prochains mois permettront de mesurer si ces annonces se traduiront en véritables avancées ou si elles ne resteront qu’un exercice de communication politique.