Le référendum est un instrument moderne, apparu dans la vie politique haïtienne pendant l’Occupation américaine. À l’époque, il se présentait comme un progrès démocratique : la possibilité de consulter directement le peuple.
Mais en réalité, le référendum a souvent été utilisé comme un outil de manipulation politique. Dans un pays où la majorité n’a pas accès à l’information, à l’éducation civique, ni à un vrai débat public, le référendum devient une simple mise en scène du consentement.
C’est une manière élégante de dire au peuple : “vous avez parlé”, alors qu’on ne lui a pas laissé le temps de penser.
Dans un contexte d’urgence, d’insécurité et de désorganisation, on appelle cela “consulter le peuple”, alors qu’en vérité, on se sert de lui pour légitimer des décisions déjà prises ailleurs.
En Haïti, chaque référendum a marqué une étape d’usure de la démocratie.
• En 1918, il a servi à valider une Constitution dictée par l’occupant.
• En 1964, il a permis à François Duvalier de devenir président à vie.
• En 1985, sous la pression populaire, il a été utilisé pour tenter de sauver la dictature.
L’histoire montre que, loin d’être un outil de participation citoyenne, le référendum a souvent été le miroir inversé de la volonté populaire.
Aujourd’hui encore, on parle d’en organiser un nouveau, sous prétexte de moderniser la Constitution. Mais dans un pays où la structure de l’État est en ruine, où la peur gouverne, où les institutions ne fonctionnent plus, parler de référendum, c’est jouer avec le feu.
Un référendum ne peut être libre et éclairé que dans un environnement où le citoyen peut comprendre, débattre, choisir sans peur et sans manipulation.
Ce n’est pas le cas en Haïti.
C’est pourquoi le vrai courage politique ne consiste pas à “demander l’avis du peuple” dans le vide, mais à créer les conditions pour qu’il puisse s’exprimer en conscience.
20 octobre 2025
Chantal Volcy Céant

