Port-au-Prince, 24 juin 2025 — Une récente circulaire signée par le chancelier Harvel Jean Baptiste (DG/0128-25), adressée aux membres du personnel des missions diplomatiques et postes consulaires d’Haïti, suscite de vives interrogations dans les milieux administratifs et diplomatiques. Sous couvert d’encadrer les modalités d’intégration à la « carrière diplomatique », cette note semble entrer en contradiction flagrante avec le Décret du 17 mai 2005, tel que publié dans Le Moniteur du 22 juillet 2005.
Une interprétation restrictive, voire arbitraire de la “carrière diplomatique”
Le Ministère affirme que seule une alternance entre les services centraux et extérieurs permettrait de prétendre à la carrière diplomatique, excluant ainsi de facto les agents n’ayant pas travaillé dans les bureaux du MAEC à Port-au-Prince. Or, cette restriction ne trouve aucun fondement dans les textes juridiques encadrant la Fonction Publique, notamment les articles 10 à 12 du Décret du 17 mai 2005, qui définissent précisément :
• Ce qu’est une carrière dans la fonction publique (article 10) ;
• Les fonctions exclues de la carrière administrative (article 11) ;
• Et les conditions de réintégration ou de détachement (article 12).
Autrement dit, toute personne n’étant pas dans une fonction explicitement exclue à l’article 11 (comme un ambassadeur nommé politiquement) devrait pouvoir intégrer la Fonction Publique si elle répond aux conditions générales (mérite, aptitude, discipline).
Une note qui viole le droit et nie les efforts de diplomates engagés
Cette note paraît donc injustement discriminatoire, notamment envers certains cadres, attachés consulaires ou autres agents ayant exercé avec rigueur à l’étranger sans pour autant être passés par les services centraux.
À un moment où le gouvernement — sous l’impulsion du Premier ministre Didier Fils-Aimé — prétend valoriser la Fonction Publique et lancer une nouvelle dynamique de professionnalisation, une telle note constitue un contre-message, voire une incohérence administrative.
Cette note de la chancelerie est interprétée comme une volonté politique d’exclure certains anciens cadres ou d’écarter des personnalités jugées gênantes.
À qui profite cette exclusion ?
La question reste entière : Pourquoi vouloir restreindre l’accès à la carrière diplomatique à des agents ayant déjà prouvé leur compétence à l’étranger ? S’agit-il d’un moyen de verrouiller l’administration, d’opérer un filtrage politique ou personnel ? Ou est-ce une tentative de créer un précédent juridique pour fragiliser les droits acquis de certains cadres diplomatiques ?
Conclusion
En l’état, la note DG/0128-25 paraît non seulement mal fondée en droit, mais aussi porteuse de divisions internes inutiles dans une institution qui aurait pourtant besoin de stabilité, de compétence, et de reconnaissance du mérite.
Il revient donc à la société civile, à la presse et surtout aux intéressés de saisir les instances compétentes pour contester cette disposition, et au Premier ministre de clarifier la position du gouvernement sur la protection de la carrière publique.
Jean François
Ancien Diplomatique Retraité