Si l’on remonte aux faits sociopolitiques et juridiques, tout en se référant au pouvoir actuel en place dénommée Conseil Présidentiel de transition, l’instabilité politique qui sévit en Haïti depuis plus de cinq ans s’explique principalement par une gouvernance défaillante, la non-application de la Constitution haïtienne du 29 mars 1987 et sans oublier l’ingérence étrangère. En 2025, la réalisation des élections est plus que jamais un vrai pari, un jeu de carte qui échappe à l’Exécutif.
Ce Conseil présidentiel de transition dirigé actuellement par Laurent Saint-Cyr dont le mandat s’achève le 7 février 2026 a une obligation majeure : Organiser les élections générales. Qu’en sera t’il réellement, entre délai, durée légale du processus et crise sécuritaire ? Si le président Jovenel Moïse n’a pu organisé les élections en 4ans ½, le CPT pourra t’il gagner le pari en 3 mois et quelques jours ?
Le mandat du président Moïse a été traversé, il faut l’avouer, par un manque de volonté manifeste à organiser les élections législatives et municipales dans les délais constitutionnels, ce qui a entraîné le dysfonctionnement dans la gouvernance du pays. On aura des maires intérimaires, un sénat incomplet et une chambre des députés inexistant.
Dans un tweet de janvier 2020, Jovenel Moïse a annoncé la fin du mandat de plusieurs sénateurs, invoquant l’expiration de leur mandat — une décision controversée, puisque le débat juridique portait sur la date de référence à retenir : celle des élections ou celle de la prestation de serment. Ce même débat devait d’ailleurs s’appliquer à la présidence elle-même. Mais, dans un contexte de chaos institutionnel déjà bien installé, Jovenel Moïse est donc resté seul aux commandes du pays.
- Depuis lors, le président gouvernait par décrets, une pratique en dehors des normes juridiques et constitutionnelles.
- L’assassinat du président élu, dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021 à sa résidence privée, n’a fait qu’empirer la situation. Le pays a été plongé dans une crise ténébreuse.
L’absence d’élus et de représentants des Pouvoirs Exécutif et Législatif a alimenté une crise multidimensionnelle affectant l’économie, les principes de gouvernance, l’ordre démocratique ainsi que les valeurs républicaines. Elle a également conduit à de graves violations : le non-respect du principe de l’État de droit, la violation systématique et systémique des droits humains.
En l’absence d’un Etat fort et organisé, l’insécurité s’est installée. Les hommes armés se sont renforcé et organisé.
S’il est vrai que les gangs armés existaient et faisait la pluie et le beau temps bien avant l’assassinat du Président Jovenel, la montée de la violence des gangs armés, de 2021-2025, dans plusieurs départements du pays, notamment l’Ouest, le Centre et l’Artibonite est alarmante.
Selon le rapport du 11 juillet 2025 des Nations Unies en Haïti au moins 4 864 personnes ont été tuées et des centaines enlevées entre octobre 2024 et juin 2025 dans l”Ouest, l’Artibonite et le Centre. Un second rapport, publié le 15 octobre 2025 par l’OIM, fait état d’un déplacement record de 1,5 million de personnes, soit une hausse de plus de 24 % depuis décembre 2024.
Selon plusieurs rapports d’organismes nationaux et internationaux, environ 80 à 85 % du département de l’Ouest serait sous le contrôle de groupes armés, empêchant la libre circulation des citoyens et bloquant les routes reliant les différentes régions du pays. Or l’Ouest, l’Artibonite et le Centre représentent plus de cinquante sept pour cent (57%) de la population selon les données de 2024 de l’IHSI et sont des départements où se concentre un grand électorat. Les départements de l’Artibonite et de l’Ouest ont le plus grand nombre d’électeurs inscrits et une forte mobilisation. Le Centre a un électorat modéré et très motivé et peut jouer un rôle déterminant dans le comptage des voix. Les communes comme Hinche et Mirebalais sont déterminants lors des élections dans le Centre.
Comment les élections seront-elles possibles dans ces départements avec la crise sécuritaire?
Daniel VEILLARD
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