Le Rassemblement pour une Entente Nationale (REN), présenté lors de la déclaration du 11 mars 2024 à la CARICOM comme représentant du secteur religieux (Interfoi), s’impose aujourd’hui comme un acteur politique de premier plan. Représenté au sein du Conseil présidentiel de transition par Madame Régine Abraham, le secteur Interfoi a hérité de la tutelle du ministère de la Jeunesse, des Sports et de l’Action civique (MJSAC) ainsi que du ministère de l’Environnement.
Dirigé par Jimmy Albert, ancien ministre de la Jeunesse et membre influent de l’Église catholique, le REN se présente comme un mouvement de renouveau, de leadership et de formation civique. Récemment, l’organisation a mis en avant une promotion de 200 diplômés formés en management, protocole, sécurité et actions civiques, une initiative saluée pour son ambition de bâtir une génération de responsables éthiques et compétents.
Cependant, une confusion persistante entoure la véritable portée de cette initiative : plusieurs observateurs peinent à distinguer ce qui relève du REN et ce qui relève du ministère. Certains attribuent la formation au mouvement politique, d’autres au MJSAC, brouillant davantage la frontière entre action publique et projet partisan.
Cette ambiguïté se déploie dans un contexte politique fragilisé, marqué par le transfert au cabinet d’instruction du dossier de la ministre de la Jeunesse, Niola Lynn Devalis Octavius, sur ordre du commissaire du gouvernement Fritz Patterson Dorval. Une affaire qui rappelle la vulnérabilité de la gestion des fonds publics et la porosité entre engagement politique et service de l’État.
Derrière la façade éducative et citoyenne, plusieurs sources concordantes évoquent une instrumentalisation politique du ministère. Des employés du MJSAC et même de la Primature auraient été recrutés comme membres du REN en vue des prochaines élections. Des photos officielles de l’organisation confirment la participation active de fonctionnaires à des activités politiques du mouvement.
Parallèlement, le ministère a enregistré plus d’une cinquantaine de nouvelles nominations, renforçant, selon un employé joint par Le Quotidien 509, « l’emprise politique du mouvement sur l’administration ». Ce dernier déplore « une collusion inquiétante » entre les activités du ministère et les ambitions partisanes du REN.
Si chaque citoyen a légitimement le droit d’appartenir à un parti politique, la confusion entre l’action civique du MJSAC et les visées électorales du REN suscite de sérieuses inquiétudes. Ce chevauchement illustre, une fois de plus, la persistance du clientélisme et des logiques de réseau au cœur des institutions haïtiennes.
La rédaction

