Deux notes circulaires successives émanant de l’Ambassade d’Haïti en République dominicaine, datées des 11 et 12 décembre 2025, ont récemment été adressées au personnel de la mission. Fidèle à son plaidoyer pour une meilleure image d’Haïti dans les rues abritant la représentation diplomatique haïtienne à Saint-Domingue, Notre rédaction a pu en confirmer l’authenticité.
La première note porte sur l’immatriculation des véhicules autorisés à utiliser le parking de l’Ambassade ainsi que sur la gestion de l’espace piéton. La seconde annonce l’absence de l’ambassadeur, Emmanuel Fritz Longchamps, en mission en Haïti du 14 au 27 décembre 2025, avec la désignation d’un chargé d’affaires a.i., Pierre Karly Jean Jeune, ministre conseiller.
À la lecture de ces documents, une question fondamentale s’impose : quelles sont réellement les priorités de l’administration de l’Ambassade d’Haïti à Saint-Domingue ? L’Ambassadeur a-t-il les pouvoirs de désigner un chargé d’affaires à.i. sans l’aval du ministre et sur quelle base?
Une administration focalisée sur les plaques… et aveugle à l’insalubrité
Il est pour le moins surprenant de constater que la Section des affaires administratives et des ressources humaines fasse preuve d’un zèle particulier lorsqu’il s’agit de vérifier que seuls les véhicules immatriculés – République Dominicaine – conformément aux normes dominicaines accèdent au parking de l’Ambassade.
En revanche, aucune mesure visible, aucun communiqué, aucune action concrète n’est prise face à une réalité pourtant flagrante : l’insalubrité chronique qui entoure et affecte directement l’espace de la mission diplomatique.
La rue jouxtant la représentation haïtienne est perçue — y compris par les médias dominicains et les riverains — comme un véritable dépotoir à ciel ouvert. Odeurs persistantes d’urine, déchets accumulés, environnement dégradé : des conditions indignes pour recevoir :
- les contribuables haïtiens,
- les usagers des services consulaires,
- les représentants des médias locaux et étrangers,
- les hautes personnalités et partenaires institutionnels.
Cette situation porte atteinte non seulement à l’image de l’État haïtien, mais aussi à la dignité des citoyens qu’il est censé servir.
Un parking exigu, une décision déconnectée du réel
Sur le terrain, le constat est sans appel : le parking de l’Ambassade peut à peine accueillir une dizaine de véhicules. Il ne dispose manifestement pas de la capacité nécessaire pour absorber l’ensemble du personnel, encore moins lors des journées de forte affluence.
Après plusieurs visites aux abords de l’Ambassade, notre rédaction a également constaté que le passage piéton est largement occupé par un commerce informel : vendeurs de canne à sucre, de saucisses, de spaghettis, de fruits, de pâtés, de chargeurs de téléphones, sans oublier un multiservice improvisé proposant photocopies et photos d’identité. Une réplique quasi fidèle de ce que l’on observe en Haïti devant les bureaux d’immigration, d’émigration ou les centres de délivrance de passeports.
Dès lors, la note circulaire sur le stationnement apparaît non seulement déphasée et non administrative, mais surtout totalement déconnectée des réalités matérielles de la mission, marquées par l’insalubrité et l’absence d’hygiène. Plusieurs questions émergent :
- Pourquoi ce communiqué maintenant ?
- Pourquoi insister sur la discipline du stationnement et des plaques alors que les conditions générales de travail et d’accueil sont si dégradées ?
Climat interne délétère et crise de gouvernance
Au-delà des problèmes matériels, un climat de tension généralisée semble régner à l’intérieur de l’Ambassade. Conflits internes, rivalités, absence de cohésion, non-respect des normes diplomatiques de hiérarchie et de fonctionnement : les dysfonctionnements ne relèvent plus de simples rumeurs, mais de faits récurrents rapportés par plusieurs sources internes.
Selon nos informations, l’ambassadeur Emmanuel Fritz Longchamps refuserait de s’impliquer dans la résolution des conflits et des crises internes, laissant l’institution s’enliser dans une gestion administrative minimaliste, sans vision ni leadership affirmé, tolérant pour le moins l’attitude hautaine et irrespectueuse de Karly Jean Jeune, désigné aujourd’hui de facto chargé d’affaires a.i.
Cette posture alimente un sentiment d’abandon, tant chez le personnel que chez les usagers, et affaiblit l’autorité morale et institutionnelle de la représentation diplomatique.
Une coïncidence troublante
Le calendrier de ces communications interpelle également. La note sur le stationnement précède immédiatement l’annonce de l’absence de l’ambassadeur, parti en mission à Port-au-Prince du 14 au 27 décembre 2025. Pour plus d’un observateur, ce timing soulève des interrogations légitimes :
- s’agit-il d’une tentative de verrouillage administratif en l’absence du chef de mission ?
- d’un écran de fumée face à des problèmes plus profonds ?
- ou d’un piège interne dans un contexte déjà fragilisé ?
Une urgence : restaurer la dignité de l’institution
L’Ambassade d’Haïti en République dominicaine ne peut se réduire à une administration obsédée par les plaques d’immatriculation, tout en fermant les yeux sur l’insalubrité, les odeurs, le malaise interne et la dégradation de son image publique.
Outre la question de sécurité liée à la position physique de l’Ambassade, Il est urgent de :
- rétablir des conditions sanitaires dignes,
- restaurer une gouvernance respectueuse des normes diplomatiques,
- réconcilier l’administration avec le personnel et les usagers,
- et redonner à cette mission diplomatique la crédibilité qu’exige la représentation de l’État haïtien à l’étranger.
Sans cela, chaque note circulaire, aussi formelle soit-elle, ne fera que creuser davantage le fossé entre l’institution et ceux qu’elle est censée servir.
Brigitte Benshow
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