Port-au-Prince, le 30 novembre 2025 — Dans une correspondance datée du 11 novembre 2025 adressée à l’Inspecteur général de la Police nationale d’Haïti (PNH), Frédéric Leconte, le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) tire la sonnette d’alarme. L’organisation dénonce de graves dérives au sein de la Direction centrale de la Police judiciaire (DCPJ) et met directement en cause son directeur, Marc Justin, accusé d’avoir bloqué ou mal géré plusieurs dossiers sensibles — dont celui, particulièrement explosif, de la saisie record de 1 045 kilogrammes de cocaïne réalisée en juillet 2025 à l’île de la Tortue. La plus grande saisie dans l’Histoire dans le PNH.
Un dossier historique… puis brutalement étouffé
Le 13 juillet 2025, la PNH — via la BLTS, l’UDMO et les Gardes-Côtes — avait intercepté la plus importante cargaison de cocaïne de son histoire. Trois trafiquants jamaïcains ont été abattus, et un ressortissant bahamien, grièvement blessé, capturé puis décédé.
À l’époque, le commissaire du gouvernement de Port-de-Paix, Me Jeir Pierre, avait souligné un fait troublant:
« Aucun corps ni arme n’a été remis aux autorités judiciaires. Deux trafiquants sont morts en mer, le troisième en route pour l’hôpital. »
Quelques jours plus tard, un incident a ravivé les soupçons : le 22 juillet 2025, Me Jeir Pierre a dénoncé le transfert, sans son autorisation, du médecin Isaac Archélus — celui qui soignait le Bahamien, unique témoin capturé. La mort jugée suspecte de ce dernier a privé la justice de la seule personne pouvant identifier les réseaux derrière la cargaison.
« Comment une telle saisie peut-elle se solder sans aucun témoin interrogé ? C’est extrêmement préoccupant », avait-il déploré.
Quatre mois plus tard, la situation est encore plus inquiétante :
- aucun rapport n’a été transmis au Parquet ;
- l’enquête n’a fait l’objet d’aucun suivi officiel ;
- l’inspecteur divisionnaire Yitzhak Dorcellus, qui avait coordonné l’opération, a été écarté, selon RNDDH;
- et la DCPJ n’a fourni aucune justification.
Pour le RNDDH, il ne s’agit plus de lenteur administrative, mais bien d’un étouffement délibéré.
Un silence politique qui interroge
Ironie du sort : l’annonce de la saisie n’était pas venue de la PNH, mais du président du CPT, Fritz Alphonse Jean, qui avait publié l’information sur X à 10 h 47 PM, saluant le DG Rameau Normil.
Après cette publication spectaculaire, plus rien.
Ni le président du CPT ni aucun autre membre du Conseil n’a exigé de comptes, ni communiqué sur l’évolution du dossier. Aucune conférence de presse, aucune pression publique, aucun rappel institutionnel.
Un dossier stratégique pour Haïti, aujourd’hui abandonné
La saisie de juillet aurait dû permettre :
- l’identification des réseaux caribéens impliqués ;
- la cartographie des routes de la cocaïne ;
- le démantèlement de circuits reliant la Jamaïque, les Bahamas et Haïti.
Pourtant, le dossier est aujourd’hui plongé dans un black-out total. Aucun progrès, aucune poursuite, aucune communication.
Pour le RNDDH, c’est l’illustration d’un État incapable — ou non désireux — de résister au crime organisé :
« Une saisie historique n’a aucun impact si les autorités responsables choisissent de ne pas agir », écrit l’organisation.
Une affaire qui dérange au plus haut niveau
Alors que les réseaux criminels gagnent du terrain et que l’insécurité dévore le pays, le traitement — ou plutôt l’absence de traitement — de cette affaire soulève une question centrale : Qui avait intérêt à ce que le dossier de l’île de la Tortue soit enterré ?
Le RNDDH exige des comptes. Reste à savoir si la PNH, l’IGPNH et les autorités de transition auront enfin le courage d’y répondre.
La rédaction
📲 Rejoignez Le Quotidien 509
Recevez nos dernières nouvelles directement sur votre téléphone via notre chaîne WhatsApp officielle.
🚀 Rejoindre la chaîne WhatsApp
