La formule est forte. Mais elle reflète une réalité désormais impossible à ignorer. Dans un rapport publié récemment, l’Office anti-stupéfiants (OFAST) parle d’un “tsunami blanc” pour qualifier l’ampleur prise par la cocaïne en France. Le phénomène, longtemps concentré dans certains cercles, s’est banalisé, porté par une offre pléthorique, une chute des prix et des réseaux de plus en plus agiles.
Une consommation record
En 2023, 1,1 million de Français ont déclaré avoir consommé de la cocaïne au moins une fois dans l’année, contre 600 000 dix ans plus tôt. Au total, 3,7 millions de personnes disent en avoir déjà pris au cours de leur vie, selon les données de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT). Un chiffre qui place la France parmi les plus gros consommateurs d’Europe.
Cette explosion s’explique notamment par la baisse du prix du gramme, passé de 70 à 58 euros en six ans. Une chute directement liée à la hausse vertigineuse de la production mondiale. En 2024, près de 4 000 tonnes de cocaïne ont été produites dans le monde, dont 2 700 en Colombie, selon les chiffres relayés par 20 Minutes. Un bond de 50 % en un an, qui inonde les marchés européens.
Une plaque tournante européenne
Longtemps simple point de passage, la France est devenue une plaque tournante majeure du trafic de cocaïne en Europe. Ses 5 500 kilomètres de côtes, la multiplication des ports de commerce et la puissance logistique de l’aéroport de Roissy en font une porte d’entrée privilégiée pour les cartels sud-américains.
Mais la France est aussi un marché intérieur désormais stratégique. Outre-mer compris, les réseaux de distribution s’étendent, s’adaptent et innovent. Si le nombre de points de deal physiques a baissé (de 4 000 en 2020 à 2 700 en 2024), la vente à la demande, les livraisons à domicile ou encore les appartements loués pour des ventes éphémères se généralisent.
Derrière cette économie parallèle, une organisation en pyramide. Au sommet, moins d’une dizaine de structures criminelles contrôlent l’essentiel des importations, en lien direct avec les producteurs d’Amérique du Sud. En dessous, environ 5 000 semi-grossistes fournissent une base de près de 200 000 revendeurs, souvent jeunes, recrutés via les réseaux sociaux.
En 2024, les forces de l’ordre ont saisi 58 tonnes de cocaïne sur le territoire français, contre 23 tonnes en 2023. Une progression qui illustre l’ampleur du phénomène.
Des ramifications en République dominicaine
Le narcotrafic à destination de la France ne s’organise pas uniquement depuis l’Amérique du Sud. Ces derniers mois, plusieurs saisies majeures en République dominicaine ont mis au jour des cargaisons destinées non seulement à la France, mais aussi à la Belgique. Ce pays caribéen, en pleine montée en puissance dans les circuits de transit, devient un point de stockage et de réexpédition stratégique pour les organisations criminelles.
Santé, violence : l’autre coût du “tsunami blanc”
Le coût humain de cette explosion est aussi sanitaire que sécuritaire. Addictive et neurotoxique, la cocaïne provoque troubles cardiaques, AVC, dépressions, psychoses, atteintes respiratoires, et peut être mortelle en cas de surdose. Les services hospitaliers alertent sur l’augmentation des cas graves.
Par ailleurs, le trafic alimente une violence endémique. En 2024, 367 assassinats ou tentatives en lien avec le trafic ont été recensés, faisant 110 morts et 341 blessés. Le nombre de communes touchées est passé de 161 en 2023 à 173 en 2024. Marseille, Grenoble et Toulouse concentrent l’essentiel des règlements de compte.
Une riposte encore en construction
Face à cette menace croissante, les pouvoirs publics tentent de muscler leur réponse. En décembre 2024, un grand plan national de lutte contre le trafic de drogues a été annoncé à Marseille. Il prévoit la création d’un parquet national antidrogue, que le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, souhaite voir opérationnel en janvier 2026.
Parallèlement, plusieurs villes mettent en place des couvre-feux pour les mineurs, à l’image de Nîmes, afin de limiter les recrutements dans les réseaux locaux.
Mais pour l’instant, la marée monte plus vite que les digues.
La rédaction
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