N’avez-vous jamais imaginé qu’un jour, tous les leaders religieux, toutes croyances confondues, décident de lancer un mot d’ordre de grève ? Ce serait un mot d’ordre de grève non pas contre les méchants, la vie chère, la violence, le crime organisé, l’indécence. Mais une grève contre le Suprême. Désormais, les leaders religieux, d’une seule voix, décrètent une semaine de grève contre tous les Dieux. Et pourquoi ? Nous avons prié. Nous avons jeûné. Nous avons offert des offrandes (Salomon ou pas). Nous avons fait des pèlerinages. Nous avons continué d’aller au temple malgré le risque de se faire tuer ou kidnapper. Finalement, nous avons tout fait pour mériter la compassion des Dieux.
Alors, quand est-ce que les Dieux vont déclarer la guerre à nos ennemis (nos compatriotes) ? Ou du moins, qui, parmi nos Dieux, est le Dieu le plus puissant, le plus courageux, le plus compatissant, le plus Dieu d’amour, pour délivrer ses enfants haïtiens de ce gouffre ? Comment un peuple, des êtres humains, peut-il continuer à adorer et à célébrer la grandeur de notre « Dieux » quand ses enfants meurent, pleurent, croupissent dans le chagrin et dans le désespoir ? Et on veut nous faire croire que le peuple haïtien n’est pas fidèle. Que ce sont des gens de peu de foi. En matière de foi, nul peuple ne peut se mesurer au peuple haïtien.
Par exemple, ils ont violé nos femmes et nos filles. Et nous remercions Dieux parce qu’il nous donne la force pour supporter cette injustice. Puis, ils ont tué, massacré, et brûlé nos hommes et nos fils. Et encore, dans notre acte de foi, nous n’avons jamais douté de l’amour de « Dieux ». En plus, ils ont détruit et emporté les biens que nous avons pris des années à réaliser. Et nous croyons fermement dans la fidélité de Dieux. Pour finir, ils nous massacrent dans l’enceinte même du temple. Et malgré tout, nous avons gardé la foi.
Peut-être le « Dieux », comme les autres, félicite les Haïtiens pour leur résilience. Bravo, nous sommes les champions de la résilience. Ceux qui nous regardent de l’extérieur disent : comment les Haïtiens en Haïti font-ils pour vivre dans de telles circonstances ? Quel courage ! Mais ils ne savent pas : on va travailler dans la peur. On emmène les enfants à l’école dans la peur. On mange dans la peur. On rit dans la peur. On dort dans la peur. On danse dans la peur. On fait l’amour dans la peur.
Non, il est temps que le peuple haïtien devienne des gens vulnérables, des humains. Alors imaginez le peuple haïtien qui va se rebeller contre « Dieux » pour le pousser à dire : Assez ! Assez ! Imaginez, pendant une semaine, que le peuple haïtien ne prie pas, ne jeûne pas, pas d’église, pas de messe, pas de péristyle. Certains diront que nous allons attirer la colère et la malédiction de « Dieux ». Par contre, d’autres diront que le « Dieux » devrait déjà être en colère de nous voir périr chaque jour.
Mabitanayiti