Port-au-Prince, 1er novembre 2025 — En Haïti, le 1er novembre ne se limite pas à la célébration de la Fèt Gede, moment spirituel où les vivants rendent hommage aux morts et se connectent au monde des ancêtres. Cette date porte aussi une autre charge symbolique : c’est le jour où Charlemagne Péralte, chef de la résistance contre l’occupation américaine, fut assassiné et crucifié par les marines, en 1919.
La Fèt Gede — célébrée les 1er et 2 novembre — plonge les fidèles dans un univers à la fois mystique et festif. Vêtus de noir, violet ou blanc, les adeptes du vaudou honorent les esprits des morts : Baron Samedi, Grande Brigitte, les Gede.
Autour des cimetières, les chants, tambours et offrandes résonnent comme un rappel : en Haïti, la mort n’est pas rupture, mais continuation de la vie. Cette célébration populaire, vivante et profondément enracinée dans la culture haïtienne, réunit familles, croyants et curieux dans une communion où se mêlent rire, prière et mémoire.
Le 1er novembre 1919, Charlemagne Masséna Péralte, chef des Cacos et figure emblématique de la résistance nationale, est trahi, capturé puis exécuté par les forces américaines près de Grande-Rivière-du-Nord.
Pour semer la peur, les marines exposent son corps attaché à une porte, bras en croix, drapeau haïtien sur les épaules. Mais cette image — censée intimider — devient au contraire un symbole d’insoumission. La photo, largement diffusée, transforme Péralte en martyr de la liberté et en héros immortel du peuple haïtien.
Plus d’un siècle plus tard, son sacrifice continue de résonner comme un rappel de la dignité nationale.
Des historiens, tels qu’Yveline Alexis dans Haiti Fights Back (Rutgers University Press, 2021), ont redonné à Péralte la place qu’il mérite dans la mémoire collective : celle d’un homme qui refusa la domination étrangère et mourut pour la souveraineté de son pays.
Le 1er novembre, Haïti célèbre à la fois les morts et les héros. Entre les tombes fleuries et les tambours des Gede, la mémoire de Charlemagne Péralte s’élève comme une autre forme de présence : celle du pays qui refuse de mourir. La Fèt Gede nous relie à nos ancêtres ; la commémoration de Péralte nous relie à notre devoir de résistance et de fierté nationale.
En cette journée de mémoire, Haïti unit le visible et l’invisible, la foi et la liberté, les esprits et les héros.
Lily Sory Ades
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